En s’appuyant sur la croissance externe, l’opérateur de cliniques et d’hôpitaux privés Elsan a multiplié sa taille par quatre en deux ans. Dans un entretien accordé à Redbridge, Arnaud Megglé, le directeur financements et trésorerie du groupe, revient sur les enjeux de l’intégration post-fusion et acquisition de la fonction trésorerie. Selon lui, la meilleure manière de réaliser les synergies d’une fusion est de s’astreindre à une dynamique d’intégration soutenue et de décloisonner les organisations de trésorerie en place.

– Redbridge : Dans le cadre d’une fusion ou d’une acquisition, comment le groupe Elsan gère-t-il le rapprochement opérationnel ?

– Arnaud Megglé : Elsan, groupe leader de l’hospitalisation privée en France, est issu du rapprochement entre les groupes Vedici et Vitalia en novembre 2015, puis avec MédiPôle Partenaires en juin 2017. En deux ans, la taille du groupe a été multipliée par 4. Dans le cadre de ces opérations, la direction a choisi de se faire accompagner par un cabinet externe pour piloter le rapprochement entre les équipes. Un œil extérieur apporte une certaine neutralité ainsi qu’une gestion dynamique de l’intégration, indispensables à la réussite d’une fusion. L’autre credo est de mêler les périmètres des équipes, afin de ne pas raisonner en silo sur les anciennes structures.

– Typiquement, à quel moment débutent les travaux de rapprochement opérationnel ?

– Dans le cadre de la fusion entre Vedici et Vitalia, des premiers ateliers se sont tenus entre la signature et la clôture de l’opération, dans le strict cadre des règles de confidentialité et de non-ingérence dans la gestion opérationnelle imposées par les règles de la concurrence. Ces échanges, organisés et pilotés par le cabinet externe, ont permis aux directions fonctionnelles d’échanger sur leurs processus respectifs.

Ces rencontres ont permis d’abord de se connaître, mais aussi de comprendre comment chaque département fonctionnait afin de jeter les bases du processus de rapprochement opérationnel. La clôture de l’opération Vitalia-Vedici était fixée au 30 octobre 2015. Dix jours après, l’organigramme était présenté. En janvier 2016, l’ensemble des processus et des outils de reporting (opérationnels et financiers) du nouveau groupe étaient opérationnels.

– Quelles décisions interviennent avant la clôture de l’opération ?

– Le principe est celui de l’indépendance complète des deux groupes dans la gestion opérationnelle, préalablement à la conclusion de l’opération. Certaines décisions demeurent toutefois soumises à l’information ou à l’accord de l’acquéreur pressenti lorsqu’elles sont susceptibles d’avoir des conséquences sur la structuration du prix d’acquisition ou sur la performance financière future du groupe. Ces décisions sont évidemment limitativement énumérées dans les accords, dans le strict respect des règles du droit de la concurrence.

Sous l’angle de l’intégration, 15 chantiers ont été identifiés, l’avancement de chaque chantier d’intégration étant sous la responsabilité d’un manager. La mise en œuvre du programme a ensuite été pilotée au rythme d’une réunion par semaine en présence de tous les chefs de chantier, avec des échéances à J, J+30, J+90 et, enfin, au-delà, J étant la date prévisionnelle du rapprochement effectif.

Pour la fonction trésorerie, l’attention était notamment portée au bon déroulement des flux de closing, ainsi qu’à la continuité des opérations suite au rapprochement (pouvoirs bancaires, outils de communication bancaire, etc.).

– Quid des aspects humains ?

– Il y avait une centaine de personnes à rapprocher au niveau du siège, réparties à 40 chez Vedici et à 60 chez Vitalia. Vitalia avait une organisation très centralisée quand celle de Vedici était plutôt décentralisée. Dans la mesure où l’essentiel des synergies de la fusion se trouvait sur les achats, et non sur les ressources humaines, les équipes opérationnelles ont tout de suite reçu un message rassurant.

– Comment s’est opéré le rapprochement de la fonction finance entre Vitalia et Vedici ?

– Vedici gérait sa trésorerie et ses financements en filiale. Il existait un début de centralisation, mais pas de cash pooling. Les opérations de trésorerie étaient gérées par le biais d’un portail de web banking et Kyriba était utilisé en outil de consultation des relevés. Le groupe disposait d’un trésorier en central.

Vitalia avait pour sa part une organisation beaucoup plus centralisée, avec un cash pooling et un partenaire bancaire principal. Depuis 2011, le groupe avait déployé l’outil de trésorerie Allmybanks, qu’il partageait avec les filiales et disposait d’un trésorier en central.

Suite au rapprochement, la nouvelle organisation bancaire a été mise en œuvre dans le cadre d’un appel d’offres bancaire, qui retenait une cible de deux comptes bancaires pour chaque filiale : un compte géré avec une banque locale et un compte géré avec une banque nationale en cash pooling.

– Quels sont les avantages de cette architecture cible ?

– Nous avons cherché à tirer parti du meilleur de chaque organisation. Le cash pooling permet de mutualiser les disponibilités, d’avoir accès à nos liquidités et de supprimer les agios. Conserver et renforcer nos relations bancaires avec des banques régionales permet d’ancrer nos établissements dans leurs territoires et d’obtenir des taux de financement plus compétitifs.

Chaque clinique a vu son avantage à faire des économies de fonctionnement. Le nombre de partenaires bancaires du groupe est passé de 60 à 15. Cette nouvelle organisation nous a également permis de renforcer la sécurité des processus de trésorerie.

– Quels sont les axes retenus pour le rapprochement avec MédiPôle Partenaires ?

– Dans le cadre du rapprochement avec MédiPôle Partenaires, nous travaillons justement à harmoniser des processus fiables de lutte contre la fraude. Au-delà, le nouveau groupe dispose actuellement de 12 cash poolings. Nous allons revoir cette structure.

– Quels sont vos chantiers pour l’avenir ?

– Nous pouvons encore améliorer nos processus d’intégration de nouvelles cliniques individuelles. Au-delà, notre prochain chantier consistera à renégocier les conditions bancaires des banques tierces du périmètre ex-MédiPôle Partenaires.

– Quels conseils donneriez-vous ?

– Mes trois conseils principaux seraient d’avoir un pilotage de projet externe, de ne pas raisonner en silo mais avoir une approche transversale et enfin de s’astreindre à une dynamique d’intégration rapide.

 

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