Les réseaux internationaux Visa et MasterCard ont proposé fin novembre 2018 d’abaisser d’au moins 40 % le niveau des commissions multilatérales d’interchange (CMI) interrégionales en Europe, en réponse aux préoccupations de la Commission en matière de concurrence. Decryptage.

Sont concernés les paiements par carte effectués dans l’Espace économique européen (EEE) avec des cartes de débit et de crédit consommateurs émises hors de l’EEE comme, par exemple, lorsqu’un touriste américain utilise une carte Visa ou MasterCard pour régler une addition dans un restaurant en France.

Dans le détail, Visa et Mastercard proposent de plafonner les commissions d’interchange applicables à ces transactions comme suit :

  • pour les paiements par carte effectués par le titulaire de la carte dans un magasin (« transactions avec présentation de carte »)

o    à 0,2 % de la valeur de la transaction pour les cartes de débit

o    à 0,3 % de la valeur de la transaction pour les cartes de crédit

  • pour les paiements en ligne (« transactions sans présentation de carte »)

o    à 1,15 % de la valeur de la transaction pour les cartes de débit

o    à 1,50 % de la valeur de l’opération pour les cartes de crédit

La Commission a soumis ces propositions à commentaires et déterminera si elles répondent à ses préoccupations en matière de concurrence. Si oui, la baisse interviendra dans un délai de six mois à compter d’une décision rendant ces engagements juridiquement contraignants. Elle s’appliquerait pour une période de cinq ans et six mois.

Pour les transactions avec présentation de la carte, les commissions d’interchange seraient alors identiques que la carte provienne de l’EEE ou en dehors. En toute logique, la fédération Eurocommerce a approuvé cet engagement, tout en critiquant la différence d’interchange grevant les transactions e-commerce. « Aucune distinction de ce type n’est faite pour les cartes émises dans l’UE… Nous ne pouvons donc pas comprendre pourquoi les commerçants devraient payer davantage pour un risque perçu qui ne peut résulter que de l’incapacité des émetteurs de cartes à mettre en œuvre des mesures de prévention de la fraude adéquates », a déclaré à Reuters un porte-parole du groupe d’intérêt, qui représente notamment Carrefour, Marks & Spencer, Lidl et Metro.

Renégociation

L’organisation européenne des consommateurs BEUC a, pour sa part, souhaité que cette baisse de l’interchange bénéficie aux clients. Encore faut-il qu’elle soit d’abord répercutée aux commerçants ! Cette question de la rétrocession ne se pose pas dans les mêmes termes selon la structure de facturation monétique négociée entre le commerçant et sa banque. En effet, certains commerçant ont depuis quelques années mis en place des structures de frais « interchange plus marge ». Pour eux, il faudra simplement vérifier la bonne application du nouvel interchange sur ces opérations.

En revanche, pour ceux qui ont une structure de frais englobant tous types d’opérations dans un taux unique, il convient de renégocier à la baisse, à plus forte raison si la proportion de cartes encaissées d’une clientèle non européenne est significative. Sont principalement concernés les commerçants du secteur du luxe, les transporteurs aériens, les entreprises de location de véhicules.

Une bataille, mais pas la guerre

Il est indéniable qu’un nouveau pas important vient d’être franchi en Europe en matière de réduction des commissions d’interchange sur les paiements par carte. La situation tranche avec celle outre-Atlantique, où les réseaux viennent d’annoncer de nouvelles hausses. Les efforts de la Commission européenne méritent d’être poursuivis. D’abord, pour combler le décalage nouvellement créé par la proposition de Visa et Mastercard entre les transactions en point de vente et celles passées dans la sphère e-commerce. Ensuite, l’attention doit se porter sur d’autres commissions ayant enregistré dernièrement des hausses inexplicables :

  • les cartes commerciales, où l’interchange s’élève 0,90% pour les cartes du GIE CB et au-delà pour les 2 réseaux internationaux ;
  • les frais de réseaux mis à jour à la hausse chaque année par VISA et Mastercard et supporté in fine par le marchand ;
  • les frais des systèmes à « trois coins » (comme American Express).
Recevez nos publications

Select your location