Emmanuel Arabian, VP Group Finance & Treasury du Groupe SEB, regrette les coupes opérées sur les couvertures d’assurance-crédit à l’étranger et analyse les conséquences de ce recul pour les grandes entreprises et le marché de l’affacturage.

– Les assureurs-crédit communiquent sur leur rôle de stabilisateur de l’économie en période de crise et promettent un ajustement des garanties progressif et transparent. Quel est votre ressenti ?
– En assurance-crédit, l’assuré peut accorder une prorogation du délai de paiement à son client en cas d’impayé. Cette période de grâce inscrite au contrat est généralement fixée à 60 jours et permet en temps normal de préparer la diminution de l’exposition au risque client de manière progressive. Cet amortisseur est inopérant dans la situation de crise actuelle, alors que la majorité des clients demandent des extensions de paiement et indiquent qu’ils ne pourront pas régler avant la fin de l’extension de maturité.

De fait, les assureurs-crédit se sont engagés à ne pas couper de manière brutale les couvertures en France, mais nous observons des diminutions importantes du montant des lignes à l’étranger, quand ce ne sont pas des annulations pures et simples. Chez SEB, nous observons des coupes sur l’Espagne, l’Italie, le Mexique, le Brésil. Les Etats-Unis semblent encore épargnés par le mouvement

– Les réductions de couvertures ne seront-elles pas compensées par la réactivation des dispositifs CAP, CAP + et CAP Francexport ?

– En 2008, les assureurs-crédit avaient coupé les couvertures sur des secteurs entiers sans regarder dans le détail la situation de l’entreprise. Il ne faut pas que cette situation se répète. La réactivation des compléments d’assurance-crédit publics est une excellente nouvelle pour les petites entreprises, mais ces dispositifs ne sont pas adaptés aux enjeux des grands groupes. Les grandes entreprises ne pourront pas s’appuyer sur l’assurance-crédit pour couvrir leurs opérations lorsque l’activité redémarrera.

Par ailleurs, la question ne concerne pas SEB, mais l’ajustement des garanties est de nature à perturber le fonctionnement des programmes d’affacturage déconsolidant, où un mécanisme d’assurance-crédit est obligatoire. En effet, après avoir cédé une créance sans recours, l’entreprise voit sa marge de manœuvre réduite pour accompagner un client confronté à des difficultés de paiement. En cas de non-paiement, le factor peut faire jouer le mécanisme de délégation d’assurance. Cela entraîne une annulation de la ligne avec le client, crée un incident sur le programme et limite à terme la capacité du factor à financer l’entreprise dans le cadre d’un programme d’affacturage déconsolidant.

– Comment SEB interagit avec ses clients dans le contexte actuel ?

– Nos clients sont majoritairement proactifs et communiquent en amont sur leurs difficultés. Nous n’avons pas observé d’annulations de paiement sauvages. Ils demandent généralement une extension de 30 à 60 jours du délai. Nous discutons avec chacun pour réduire nos expositions et ajuster les délais de règlement. Nous renforçons également notre analyse financière pour suivre au plus juste l’évolution du risque.

Par chance, SEB a un bilan solide et une maturité de dette assez étalée. Nous pouvons accompagner nos clients et les soutenir, avec prudence et parcimonie, tout comme nous soutenons également nos plus petits fournisseurs, en raccourcissant nos délais de règlement.

Recevez nos publications

Select your location