Alors que le développement durable s’impose comme un enjeu clé à l’échelle mondiale – particulièrement en Europe – les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) restent encore peu visibles dans l’industrie des paiements. Dans cet article, nous analyserons en détail des exemples concrets d’initiatives ESG dans les paiements et partagerons quelques réflexions sur la manière dont le secteur peut s’emparer d’un sujet aussi stratégique.

Cet article a été initialement publié dans le magazine The Paypers.

Au fil des années, les institutions financières ont joué un rôle clé dans la promotion du développement durable, notamment en réduisant la consommation de ressources grâce à la numérisation et à l’innovation dans le secteur des paiements.

Prenons quelques exemples. Les cartes virtuelles contribuent à réduire les déchets plastiques. Des logiciels de paiement directement intégrés aux smartphones diminuent la nécessité de terminaux physiques en points de vente. Les plateformes de cartes numériques offrent aux émetteurs la possibilité de proposer des options durables, fondées sur des données qui informent les consommateurs de leur impact environnemental. Enfin, un travail sur l’efficience des transactions et des partenariats avec des centres de données neutres en carbone participent à réduire l’empreinte énergétique des paiements numériques.

Certaines fintechs ont construit leur proposition de valeur autour de l’inclusion financière et de la responsabilité sociale. Elles proposent, par exemple, des produits financiers accessibles, des portefeuilles ou des comptes bancaires inclusifs, ainsi qu’un accès aux aides sociales pour les populations financièrement vulnérables.

Des incitations financières pour des paiements plus durables

Malgré les bienfaits évidents de ces initiatives, un écart persiste dans l’alignement des pratiques ESG entre le secteur des paiements et les commerçants. Contrairement aux activités de financement, où les banques offrent des incitations directes aux clients répondant à des critères ESG spécifiques, le secteur des paiements n’a pas encore pleinement intégré l’engagement ESG des commerçants et des consommateurs.

Alors que l’inclusion financière se développe, certaines parties prenantes du secteur des paiements se demandent si les entreprises contribuant aux objectifs ESG devraient bénéficier de conditions plus avantageuses. Par exemple, les commerçants pourraient bénéficier de meilleurs taux d’interchange ou d’une tarification plus avantageuse s’ils respectent certains principes ESG spécifiques. De même, les clients achetant des biens ou des services essentiels via le programme « Achetez maintenant, payez plus tard » (BNPL) devraient-ils bénéficier d’une réduction de prix ?

Du côté des consommateurs, certaines initiatives commencent à émerger, où les entreprises incitent les utilisateurs à compenser l’empreinte carbone de leurs transactions – en particulier dans l’industrie du voyage, qui a fait l’objet d’un examen approfondi concernant les enjeux ESG et de durabilité. D’autres offrent aux clients la possibilité de faire don des centimes restants à des projets caritatifs, arrondissant ainsi le montant de leur transaction.

Les principales parties prenantes pour une transition réussie

La transition vers un secteur des paiements plus durable nécessite des efforts coordonnés de la part de diverses parties prenantes, notamment les institutions financières, les réseaux, les commerçants et les consommateurs. Les initiatives privées et les politiques publiques pourraient promouvoir cette transformation en encourageant les entreprises qui donnent la priorité à la durabilité.

Dans l’Espace économique européen, les réglementations financières se sont concentrées sur la promotion des investissements socialement responsables et la pénalisation des pratiques nuisibles à l’environnementLe secteur des paiements a été peu concerné par ces réglementations. Les commissions d’interchange étant uniformément plafonnées dans tous les secteurs d’activité, la marge de manœuvre est moindre, d’ailleurs. Si l’Union européenne (UE) a ouvert la voie avec des réglementations fondamentales, telles que la protection des données à travers le Règlement général sur la protection des données (RGPD) et la réduction de la fraude par le biais de diverses directives sur les services de paiement, il est frappant de constater l’absence de considérations ESG claires et transversales dans le monde des paiements. Cela représente incontestablement une occasion manquée d’établir des références solides en matière de durabilité pour cette industrie.

Naviguer dans les méandres de l’adoption des principes ESG

Bien que ces concepts de durabilité dans les paiements soient fascinants, l’intégration des principes ESG soulève ici des défis importants, à commencer par la nécessité d’une gestion des données et d’une transparence solides. Un reporting ESG efficace nécessite des systèmes de données avancés, lesquels demandent des investissements substantiels pour suivre et rapporter avec précision les impacts environnementaux et sociaux. L’absence de mesures normalisées complique la comparaison des performances par rapport aux pairs du secteur, ce qui nuit à l’efficacité globale des initiatives ESG.

Au-delà des investissements technologiques, cultiver un engagement en faveur de l’ESG implique des changements culturels au sein des organisations. Les sociétés de paiement doivent s’assurer de l’adhésion à tous les niveaux, des dirigeants aux employés de première ligne, afin de favoriser une véritable culture axée sur le développement durable. Les programmes de formation et d’engagement seront indispensables pour intégrer l’ESG dans la culture de l’entreprise, et non pas la traiter comme une simple mode passagère.

Les considérations de coût représentent également un obstacle majeur pour les prestataires de services de paiement de petite taille, qui pourraient rencontrer des difficultés à concilier investissements dans le développement durable et rentabilité. Bien que les avantages à long terme des pratiques durables, tels que les économies de coûts et une fidélité accrue à la marque, puissent compenser les dépenses initiales, les petites entreprises ont souvent du mal à assumer ces coûts sans le soutien de l’industrie.

Enfin, une communication transparente et un engagement actif auprès des parties prenantes – y compris les actionnaires, les clients et les organismes de régulation – sont essentiels pour concilier rentabilité et durabilité. Ce processus délicat oblige les sociétés de paiement à faire connaître efficacement leurs initiatives ESG et la valeur à long terme qu’elles apportent à toutes les parties prenantes.

Conclusion

Alors que les attentes pointent en faveur d’un engagement des systèmes de paiement vers un monde plus durable, la question du leadership demeure. Les réseaux et les prestataires de services de paiement doivent-ils prendre l’initiative de promouvoir des pratiques durables, ou les gouvernements et les régulateurs doivent-ils jouer un rôle plus actif dans la concrétisation de ces changements ? Si les initiatives privées ne suffisent pas à atteindre les objectifs ESG, les politiques publiques pourraient inciter davantage l’écosystème des paiements à adopter des normes plus écologiques. L’approche de l’UE en matière d’ESG pourra-t-elle finir par instaurer une référence mondiale pour les systèmes de paiement ?

D’autre part, les consommateurs devraient-ils adopter une attitude plus proactive en contribuant à couvrir les coûts environnementaux de leurs transactions ? Pour aller de l’avant, il sera sans doute nécessaire de faire preuve d’innovation, de collaboration et d’une volonté d’aborder ces enjeux cruciaux.
À mesure que le secteur des paiements progresse vers la durabilité, chaque partie prenante doit réfléchir à la manière dont elle peut contribuer à un système qui concilie rentabilité et durabilité. Il est certain que les premières actions que les commerçants peuvent entreprendre consistent à structurer un système solide et à examiner la rentabilité de leur activité.

Pour prolonger l’échange autour du thème des paiements durable ou contacter sur un autre sujet notre équipe conseil en monétique. Il n’y a qu’un lien : https://www.redbridgedta.com/fr/contact/ 

Découvrez les meilleurs articles du blog Finance-Tréso 2024 publiés par le cabinet de conseil Redbridge, spécialisés dans le financement, la trésorerie et les paiements. Ces blogs sont destinés aux directeurs financiers (CFO) et aux professionnels de la finance, offrant des analyses approfondies, des études de cas, ainsi que des perspectives sur les tendances émergentes du marché.

#9. Le basis swap $/€ dope l’attractivité de l’USPP

« Le niveau du basis swap $/€ dope l’attractivité du marché de l’USPP », Muriel Nahmias – Redbridge Pour notre blog, notre experte en financement Muriel Nahmias passe aujourd’hui au crible le marché de l’US Private Placement. Pour qui, pour quoi, comment ? Vous saurez tout sur la manière d’accéder à une source de financement profonde et offrant des maturités longues, à très bon compte en ce moment s’il est émis en euros.

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#8. Les Licornes, la croissance et les banques

Lisez l’entretien intégral de L’Espresso du 29 mai 2024 avec notre invité Pascal Ichard, directeur des financements de la Mirakl. L’Espresso, l’émission de Redbridge programmée le temps d’une pause-café, accueillait ce mercredi 29 mai le directeur des financements de Mirakl, Pascal Ichard, à l’occasion de la signature du premier crédit syndiqué de cette entreprise fleuron de la French Tech. L’échange a porté sur le thème des relations bancaires avant, pendant et après un premier financement pour les entreprises de croissance.

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#7. REPLAY – Webinaire – Wero change la donne des paiements en Europe

Depuis le 1er octobre, Wero change la donne des paiements en Europe et nous avons le plaisir de proposer en replay notre webinaire consacré au lancement de cette nouvelle solution de paiement de particulier-à particulier : « Comment changer la manière dont l’Europe paie ? »

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#6. Comprendre et construire une relation bancaire équilibrée

Lors des Journées de l’AFTE 2024 au CNIT, un atelier d’une grande richesse a exploré le thème essentiel des relations bancaires. À travers les interventions de Jean-Christophe Sautereau , directeur trésorerie et financement chez SMCP – Sandro, Maje, Claudie Pierlot, Fursac , Chloé Audrin, directrice financement et gestion des relations bancaires chez Air Liquide et Arnaud Morgant, responsable clientèle corporate chez Société Générale Corporate & Investment Banking, les participants ont pu approfondir leur compréhension des leviers d’une relation bancaire équilibrée.

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#5. Titrisation : une reprise nécessaire du marché européen

Le rapport Draghi sur la compétitivité européenne* est sans équivoque : « Pour augmenter la capacité de financement du secteur bancaire, l’UE doit relancer la titrisation ». La Commission Européenne vient, en réponse, de lancer une consultation** ciblée sur le fonctionnement du marché de la titrisation.

La titrisation a particulièrement souffert en Europe des conséquences de la crise financière de 2008. Avant la crise, le marché européen (incl. le Royaume Uni) représentait 75% de celui des Etats Unis. En 2020, il s’établissait à seulement 6%. A l’origine de cet écart on trouve, notamment, des règlementations plus sévères dans l’Union Européenne.

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#4. Résultats de l’enquête AFTE-Redbridge – Organisations de trésorerie / La révolution digitale

Le rapport final de l’enquête sur les organisations de #trésorerie menée conjointement par l’Association Française des Trésoriers d’Entreprise (AFTE) et Redbridge est disponible !

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#3. Paiements – Des stratégies efficaces pour limiter les contestations et les chargebacks frauduleux

Gabriel Lucas, directeur chez Redbridge Debt and Treasury Advisory, aborde le sujet de l’augmentation de la fraude amicale et des rétrofacturations (les chargebacks frauduleux), en dévoilant quelques stratégies pour y remédier.

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#2. Financement SBF 120 – S’adapter à une liquidité bancaire plus sélective

Comme chaque rentrée depuis 14 ans, notre équipe conseil en dette présente ses perspectives pour les marchés de dette et la stratégie financière des entreprises françaises, une analyse fondée sur l’évolution de la structure d’endettement des corporates du SBF 120. Sur fond de détérioration de la trésorerie et du BFR, la question centrale cette année est de s’adapter à la raréfaction prévisible de la liquidité bancaire. Si l’affacturage semble pour l’heure avoir été la voie privilégiée par les directions financières, les opportunités sont nombreuses pour les ETI en quête de diversification de leurs sources de financement.

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#1. Les Mousquetaires : quand l’intelligence artificielle optimise la trésorerie

Pour Redbridge, Laurent Bonhomme et Sébastien Schweickert livrent tous les détails de l’expérience réussie d’optimisation des prévisions de trésorerie du Groupement Les Mousquetaires grâce à un modèle d’intelligence artificielle prédictive. Le projet, initié il y a cinq ans, fournit des résultats tangibles et durables grâce à l’investissement d’une équipe de trois experts. Une belle illustration des défis posés par l’intégration de l’intelligence artificielle aux processus de trésorerie.

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Revivez les temps forts des Journées de l’AFTE des 25 et 26 novembre à travers notre série de quatre articles et une vidéo dédiés aux sujets suivants :

Les relations bancaires, L’IA appliquée à la trésorerie, La remise des prix du meilleur mémoire de finance, Les Trophées de l’AFTE, Et les innovations de Redbridge en matière de structuration des données au service des trésoriers.

Comprendre et construire une relation bancaire équilibrée

Lors des Journées de l’AFTE 2024 au CNIT, un atelier d’une grande richesse a exploré le thème essentiel des relations bancaires. À travers les interventions de Jean-Christophe Sautereau , directeur trésorerie et financement chez SMCP – Sandro, Maje, Claudie Pierlot, Fursac , Chloé Audrin, directrice financement et gestion des relations bancaires chez Air Liquide et Arnaud Morgant, responsable clientèle corporate chez Société Générale Corporate & Investment Banking, les participants ont pu approfondir leur compréhension des leviers d’une relation bancaire équilibrée.

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Concilier innovation et résilience avec l’intelligence artificielle

Lors des Journées de l’AFTE, lundi 26 novembre, un atelier captivant a rassemblé un large public dans l’amphithéâtre du CNIT autour de la place de l’intelligence artificielle (IA) dans la trésorerie d’entreprise. Le sujet, à la croisée des questions d’innovation et de résilience, a mis en lumière une certitude partagée par les intervenants : tout comme pour la digitalisation, la question n’est plus de savoir s’il faut adopter l’IA, mais bien de déterminer comment, sur quels processus et pour quels résultats ?

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Prix du meilleur mémoire de finance – Les lauréats

Bravo aux lauréats du prix 2024 du meilleur mémoire de finance de l’AFTE ! Cette année, parmi les 44 mémoires reçus d’étudiants en écoles et en universités de toute la France, les membres du jury ont récompensé des travaux abordant les thèmes du développement durable, de la responsabilité sociale, de l’immobilier et de l’euro numérique, des sujets certes techniques, mais qui touchent de près aux réalités contemporaines de l’économie.

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Première édition des Trophées de l’AFTE : honorer les projets et les équipes

L’AFTE a remis hier ses tous premiers Trophées. Pour cette première édition l’objectif était clair : mettre en avant des projets et des équipes, plutôt que de récompenser un individu. Comme l’a souligné Benoît Rousseau, administrateur de l’AFTE et directeur de la trésorerie et des assurances de Bel, « le métier de trésorier est un métier collectif ».

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Redbridge – 25 ans d’innovation au service des directions financières !

Redbridge Debt & Treasury Advisory évolue depuis sa création avec les mutations technologiques du métier de trésorier. Sa dernière réalisation ? Missionner une équipe interne de 8 data scientists pour industrialiser l’exploitation de toutes les données patiemment collectées par ses équipes conseils. David Laugier, Chief Operating Officer du groupe, présente comment cette équipe renforce le caractère stratégique de la donnée, avec l’aide de l’intelligence artificielle, pour porter plus loin les projets des entreprises en matière de financement, de cash management et de paiements.

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Pour Redbridge, Laurent Bonhomme et Sébastien Schweickert livrent tous les détails de l’expérience réussie d’optimisation des prévisions de trésorerie du Groupement Les Mousquetaires grâce à un modèle d’intelligence artificielle prédictive. Le projet, initié il y a cinq ans, fournit des résultats tangibles et durables grâce à l’investissement d’une équipe de trois experts. Une belle illustration des défis posés par l’intégration de l’intelligence artificielle aux processus de trésorerie.

Trop souvent, l’évocation de l’intelligence artificielle appliquée aux processus de trésorerie se résume à des promesses d’un monde meilleur et merveilleux. Un monde où les praticiens sont délivrés par la machine des tâches fastidieuses du quotidien de leur métier. Un monde où il devient possible de se concentrer exclusivement sur l’analyse et les tâches à valeur ajoutée, pour s’attirer (enfin ?) les bonnes grâces de la direction. Mais qui croit véritablement à ces discours non étayés par des faits ?

l’intelligence artificielle optimise la trésorerie

Loin du blabla et des salades, le Groupement Les Mousquetaires, qui regroupe les enseignes de distribution Intermarché, Netto, Bricomarché, Brico Cash, Bricorama, Roady et Rapid Pare-Brise associé à une centrale d’ Achat, des fonctions d’ appuis, une logistique propre , des bases et des usines de production  , a intégré avec succès l’intelligence artificielle à ses processus de prévisions de trésorerie. L’orchestrateur de ce projet, Sébastien Schweickert, et son promoteur, Laurent Bonhomme, directeur des financements, de la trésorerie et des relations investisseurs du Groupement Les Mousquetaires, étaient les invités du petit-déjeuner client organisé mi-novembre par l’équipe transformation de la trésorerie de Redbridge. Leur retour d’expérience a souligné toute la complexité d’un chantier d’intégration de l’intelligence artificielle aux processus de cash flow forecasting ; la nécessité d’y consacrer des ressources conséquentes dans le temps ; et le besoin de constamment suivre le jeu des données pour que le modèle ne s’encrasse pas mais, au contraire, évolue vers toujours plus de précision.

Au prix de ces efforts, le Groupement Les Mousquetaires est parvenu à ramener de 3 % à 1 % la marge d’erreur sur ses prévisions à 12 semaines, « un niveau acceptable pour pouvoir prendre des décisions financières », selon Laurent Bonhomme. Le Groupement estime à un million d’euros annuels les économies générées par son modèle de prévisions de trésorerie à base d’intelligence prédictive, à travers une allocation plus performante du cash disponible et un calibrage plus fin des tirages bancaires et des billets de trésorerie (NEU CP).

Les enjeux et les prérequis du projet Cash Flow Management

A l’origine du projet d’amélioration des prévisions de trésorerie grâce à un modèle d’IA prédictive – baptisé Cash Flow Management (CFM) -, la création d’un Data Lab destiné à « réaligner les planètes entre les expertises métier et les données ». Laurent Bonhomme explique : « La donnée constituait le premier étage du lancement de notre projet. Le deuxième était de savoir si le jeu en valait la chandelle. Pour Les Mousquetaires, la réponse était oui, en raison d’un différentiel élevé entre le coût des financements court terme et le niveau de rémunération des placements de trésorerie. Le troisième étage traitait de notre capacité à faire vivre le modèle de prévision de trésorerie via une gouvernance adaptée, et à le mettre au service de chaque département du groupe. Enfin, le quatrième étage consistait à mener des tests sur l’historique de nos prévisions ».

Le projet CFM consiste à modéliser par méthode directe pas moins de 15 milliards d’euros de flux sur trois mois. Au-delà de cet horizon, il y a trop d’éléments perturbant les prévisions de la trésorerie du Groupement, dont le pic s’élève à 1,2 milliard d’euros. CFM mobilise en équivalent temps plein une équipe de 1,5 data scientist et 0,5 data engineer, sous la direction d’un troisième mousquetaire, Sébastien Schweickert.

Selon lui, l’ancien modèle de prévisions de trésorerie, fondé sur excel, peinait à identifier des motifs récurrents sur les encaissements et les décaissements du Groupement. « Bien que chronophage et porteur d’erreurs sur horizon long, l’ancien modèle fonctionnait toutefois. Il convenait donc de rendre sa donnée plus exploitable et gommer ses dérives », commente M. Schweickert. Aussi, trois ans après le lancement du projet CFM, Les Mousquetaires continuent toujours de comparer les prédictions en back-testing de leur ancien modèle excel, avec celles basées sur l’intelligence artificielle et le machine learning.

Interface avec les outils de trésorerie, l’ERP et des sources externes

Concrètement, l’équipe a commencé par développer une interface à l’entrée de son logiciel de trésorerie  (ndlr – Kyriba) pour s’assurer un accès intelligent et récurrent à la donnée brute de trésorerie. Sans se faire aider d’un éditeur, l’équipe a ensuite construit deux modèles de prévisions. D’abord, un modèle métier, qui est une réplication du modèle excel, et s’appuie sur des règles métiers, des indices d’ évolution propres à chaques Métiers , etc.) Ensuite, un second modèle basé sur l’apprentissage d’une IA prédictive alimentée par une masse complémentaire de données externes (cours du pétrole et des denrées alimentaires de base notamment).

« Le cadre préalable nécessaire à l’épanouissement de ce projet incluait un cash pooling quotidien efficace, une modélisation des flux de trésorerie en vision compte de résultats (hors stocks) et une passerelle entre l’ERP comptable et l’outil de trésorerie. Nous menons notre suivi du modèle en comparant à J+2 les prévisions à la réalité. Nous analysons les flux de trésorerie et comment la donnée est séquencée, notamment les délais de paiement par type de flux. Enfin, nous contrôlons la stabilité des règles d’affectation de nos données et leur profondeur. Un minimum de 5 ans est nécessaire. »

10.000 lignes d’entrées par jour

Après avoir mené une preuve de concept (POC) en 2019, le Groupement Les Mousquetaires a lancé le projet CFM en 2020-2021, durant la période Covid. S’en est suivi un premier moteur de prédiction, utilisé à partir de 2022. « La crise de la COVID était un évènement exceptionnel, que nous avons détaché de la période d’apprentissage, mais qui se reflète néanmoins dans l’évolution des données comportementales, car les habitudes de consommation ont profondément changé en lien avec des évolutions sociétales comme le télétravail », souligne Sébastien Schweickert.

Dans le modèle actuel, les données du COVID peuvent aujourd’hui être réintégrées à tout moment par le trésorier, à la manière d’un évènement réplicable. En tout, le modèle fonctionne sur 10.000 lignes d’entrées par jour, et l’équipe travaille à intégrer à ses modèles prédictifs de nouvelles variables explicatives, telles que l’impact de la crise énergétique ayant suivi le déclenchement de la guerre en Ukraine ou l’accélération de l’inflation.

« Nous mettons en garde contre les changements intempestifs de tags sur les données, qui ne permettent plus à la machine d’apprendre ! Une fois les règles de classification des différents flux établies, elles doivent rester immuables et sanctuarisées. Cela vaut tout particulièrement pour la classification des frais d’exploitation ou la décomposition analytique des coûts des fournisseurs de denrées ». Le responsable de CFM rappelle à cette occasion que l’IA n’est pas toujours intelligente. « Il y a parfois des dérives qui peuvent se prolonger durant plusieurs mois avant d’être corrigées par l’homme ».

Une marge d’erreur sur les flux inférieure à 1 %

Le modèle des Mousquetaires a évolué avec les pratiques métiers, par exemple à l’occasion de l’introduction de nouvelles règles en matière de ristournes. Alors qu’il se limitait à l’origine au périmètre du Groupement, le modèle s’est élargi au début de l’année 2024 pour développer une vision alliance et une vision par pôles.

Pour quel résultat ? Limiter l’endettement brut, à travers des prévisions plus précises. En la matière, le modèle affiche un écart maximal de prévisions sur les flux de 100 à 150 millions d’euros, soit moins de 1 % sur un chiffre d’affaires de 15 milliards, contre 3 % auparavant.

« Le ROI ne se mesure toutefois pas qu’au gain financier. Alors que notre trésorerie est cyclique, avec de grosses variations à la baisse du 15 janvier au 15 juin, suivies d’une reconstitution entre le 15 juin et le 15 janvier, il est intéressant et rassurant de pouvoir prédire avec précision les points bas de l’activité… et de prévenir en amont nos créanciers », conclut Laurent Bonhomme.

Lors des Journées de l’AFTE 2024 au CNIT, un atelier d’une grande richesse a exploré le thème essentiel des relations bancaires. À travers les interventions de Jean-Christophe Sautereau , directeur trésorerie et financement chez SMCP – Sandro, Maje, Claudie Pierlot, Fursac , Chloé Audrin, directrice financement et gestion des relations bancaires chez Air Liquide et Arnaud Morgant, responsable clientèle corporate chez Société Générale Corporate & Investment Banking, les participants ont pu approfondir leur compréhension des leviers d’une relation bancaire équilibrée.

Chez SMCP, Jean-Christophe Sautereau envisage les relations avec les banques comme un partenariat stratégique, fondé sur la transparence. Son groupe alloue ses flux en fonction des engagements des banques. « C’est la reconnaissance du ventre, l’entreprise se doit d’être équitable », fait valoir le DFT, qui compte treize banques à son pool de financement et travaille avec six autres banques qui ne financent pas le groupe, pour répondre à des besoins locaux, notamment de remise de cash. « La juxtaposition des présences géographiques des banques peuvent amener à certains déséquilibres, que nous nous efforçons de compenser en s’appuyant sur notre connaissance des métiers de nos partenaires », souligne Jean-Christophe Sautereau.

Journées de l'AFTE 2024

Côté entreprise – Mesurer / Ausculter sa relation

La relation bancaire s’envisage chez Air Liquide selon les mêmes principes d’allocation du side business en fonction des engagements, s’il fallait résumer. A la différence que Chloé Audrin utilise d’un outil quantitatif avancé pour analyser ses relations : « Le RAROC ou Risk Adjusted Return on Capital est un indicateur permettant de mesurer la rentabilité estimée des relations bancaires d’Air Liquide. Il calcule, pour chaque banque partenaire, la rentabilité de son activité avec le groupe, en déterminant combien de revenus et de marge nette sont générés pour chaque euro de capital engagé. Cette analyse globale englobe tous les produits et services bancaires utilisés et est réalisée chaque année au premier trimestre, sur la base des données de l’année précédente ». La responsable indique partager avec l’ensemble des décideurs d’Air Liquide son analyse, qui contient notamment un graphe très visuel, présentant les engagements, la rentabilité et le volume d’affaires généré auprès de chaque partenaire bancaire.

Air Liquide complète son analyse d’une étude qualitative auprès des différents services du groupe en relation avec les banques partenaires, en s’intéressant à des critères comme l’implantation géographique, la compréhension des besoins, ou encore la responsabilité sociale et environnementale. Le tout, qualitatif et quantitatif, occupe une personne et demie durant trois mois. « Tout le monde ne souhaite pas ou ne peut pas faire le même travail, mais il est toujours possible de mettre en place un suivi quantitatif de ses relations bancaires. Ce qui compte n’est pas tant que le modèle soit  parfaitement juste ou complet, mais plutôt qu’il soit cohérent et permette de véritablement comparer les banques », conclut Chloé Audrin.

SMCP ne mène pas une analyse aussi poussée qu’Air Liquide, mais Jean-Christophe Sautereau partage l’opinion de sa consœur. « Il faut être en mesure de dire au top management quelle est la banque qui génère la plus grande valeur ajoutée. Nous menons notre suivi quantitatif sur des statistiques de flux et de respect des quotas bancaires en fonction des lignes attribuées en appliquant des poids différents selon les instruments : garanties, Forex ou découverts par exemple. La partie qualitative se traduit par une synthèse des niveaux de satisfaction », souligne-t-il.

 relation bancaire

Côté banque – des métriques alignées avec la stratégie groupe

Arnaud Morgant a présenté les éléments clés fondant les décisions de crédit et de pricing au sein de la banque en général, et SGCIB en particulier. Parmi eux, les revenus détaillés par nature et suivis par client chaque année, voire chaque trimestre ; ainsi que la consommation de fonds propres évaluée à travers le RWA (Risk Weighted Assets), qui se fonde sur la notation du client, la maturité du financement ou de l’opération de marché, le type de concours (garantie de marché ou financement par exemple).

Entrent également en ligne de compte les dépôts et le courant d’affaires proportionné au niveau d’engagement. Derniers éléments importants : l’alignement sur la politique RSE de la banque « qui prend une importance croissante », l’historique de la relation et la satisfaction du client mesurée via un Net Promoter Score, en vigueur depuis plusieurs années chez SGCIB.

La rentabilité de la relation jour évidemment un rôle important dans les décisions d’octroi de financement. « Une banque ne peut pas travailler à long terme au service d’une relation globalement non rentable. Néanmoins, la décision de participer à un financement n’est pas prise de manière mécanique sur la seule base du couple rendement-risque de l’opération ou de la rentabilité globale de la relation », fait valoir Arnaud Morgant. Les questions clés seraient alors : la rentabilité globale est-elle faible pour des raisons structurelles ou peut-elle évoluer ? Quelles sont les solutions alternatives pour le client si la banque décline ? Est-on en face d’une opération stratégique sur laquelle la banque ne peut tout simplement pas ne pas être présente ?

Journées de l'AFTE 2024 – Jour 2 : Comprendre et construire une relation bancaire équilibrée

Comprendre sa notation bancaire

Il est certain que l’équilibre d’une relation bancaire repose sur une compréhension approfondie des objectifs et des processus de ses partenaires financiers. Au-delà des métriques, comme l’allocation du side business, la notation bancaire est un élément fondamental souvent négligé par les entreprises dans leurs discussions avec leurs banquiers.

Comme l’a souligné Arnaud Morgant, cette notation joue un rôle déterminant. Elle impacte directement le circuit de décision de crédit : plus le risque perçu par la banque est élevé, plus les instances décisionnaires mobilisées seront seniors. Elle influence également de manière fondamentale le niveau de fonds propres mobilisé via le calcul du RWA, ce qui a des répercussions sur le pricing et, in fine, sur la rentabilité des fonds propres de la banque.

Pourtant, selon un sondage mené en direct auprès des participants à la table ronde, la moitié des trésoriers déclaraient ignorer leur notation bancaire interne, tandis qu’un quart n’en avait qu’une connaissance partielle. Pour David Laugier, Chief Operating Officer de Redbridge et modérateur de la session, « il ne fait aucun doute que la notation interne doit être systématiquement demandée et constituer une base de discussion avec sa banque. »

L’équipe conseil en dette de Redbridge, relève régulièrement des disparités pouvant atteindre trois crans entre les notations attribuées par les banques d’une même entreprise. Ces écarts ont des conséquences significatives, notamment dans le cadre de syndication de financements importants. Sous cet angle, réaligner la perception des prêteurs sur la réalité des risques de l’entreprise constitue bien un levier essentiel à intégrer dans la gestion de ses relations bancaires.

 

L’AFTE a remis hier ses tous premiers Trophées. Pour cette première édition l’objectif était clair : mettre en avant des projets et des équipes, plutôt que de récompenser un individu. Comme l’a souligné Benoît Rousseau, administrateur de l’AFTE et directeur de la trésorerie et des assurances de Bel, « le métier de trésorier est un métier collectif ».

Un processus exigeant et des projets de grande qualité Le jury, composé de trésoriers, banquiers, éditeurs et avocats, a été impressionné par la qualité des 14 projets soumis à son appréciation. Deux prix ont été décernés pour cette édition inaugurale.

Prix de l’opération de transformation structurante de l’année

Parmi les nominés figuraient : Danone, Kering, Pernod Ricard, Pluxee, Servier, Thales Group, et l’URSSAF Caisse Nationale.

Le Trophée a été remis à l’équipe Thales pour son projet de carve-out de l’activité ferroviaire du groupe. Ce projet représentait 10 % de l’activité totale du groupe et s’est révélé particulièrement complexe. Initialement prévu pour durer entre douze et dix-huit mois, le projet s’est finalement étalé sur trois ans, notamment en raison de la nature internationale de l’opération d’acquisition par Hitachi Rail, une entité anglo-italienne. Le périmètre couvrait 45 pays : chaque filiale devait devenir indépendante avec des comptes bancaires propres et des garanties transférées dans le cadre de la cession. L’un des défis majeurs portait sur le transfert d’un portefeuille de change de plus de 1 000 lignes, mobilisant intensément les équipes de front office de Thales et d’Hitachi.

Ce prix illustre une vision stratégique et récompense une transformation orchestrée avec succès dans la durée. Les critères d’évaluation comprenaient :

  • l’innovation et l’inspiration,
  • la réalisation et l’ambition,
  • l’excellence et l’impact pour l’entreprise,
  • l’intégration dans la politique RSE du groupe.

Le jury a également décerné une mention spéciale à l’URSSAF pour son premier projet d’intelligence artificielle dédié à la prévision de trésorerie, désormais opérationnel.

Prix de l’opération de financement remarquable de l’année

Les candidats en lice étaient : Accor, Eramet, Saint-Gobain, SNCF, Teleperformance, URSSAF et Virbac.

Ce trophée visait à mettre en valeur des opérations complexes et innovantes. Après délibération, le jury a désigné un lauréat et accordé deux mentions spéciales.

Le Trophée a été attribué à Eramet, qui a réalisé un financement structuré de 400 millions de dollars pour une mine de lithium en Argentine.

Ce financement était structurant pour Eramet, portant sur une mine encore en construction, située dans une géographie avec un risque politique élevé et s’appuyant sur une technologie d’extraction brevetée.

L’innovation majeure résidait dans la possibilité de rembourser le financement soit en livrant du lithium, soit d’autres matières premières, de façon à réduire ainsi les risques liés à la construction et au pays. Le projet, développé en collaboration avec l’équipe M&A d’Eramet, les banques partenaires et le client final, a culminé avec la sélection de Glencore comme partenaire stratégique pour un accord de long terme.

Deux mentions spéciales ont été décernées :

  • Virbac, pour une opération au Japon où la dimension culturelle était particulièrement importante.
  • Teleperformance, pour une opération de plus de 3 milliards d’euros, une taille exceptionnelle pour cet emprunteur.

Un tremplin vers les Trophées de l’EACT

Les deux vainqueurs de cette première édition auront l’opportunité de participer aux Trophées de l’EACT, renforçant ainsi leur visibilité et celle de leurs équipes.

L’AFTE invite d’ores et déjà ses membres à préparer leurs candidatures pour la deuxième édition de ces trophées, un véritable levier pour valoriser les équipes et leurs projets collectifs.

Bravo aux lauréats du prix 2024 du meilleur mémoire de finance de l’AFTE ! Cette année, parmi les 44 mémoires reçus d’étudiants en écoles et en universités de toute la France, les membres du jury ont récompensé des travaux abordant les thèmes du développement durable, de la responsabilité sociale, de l’immobilier et de l’euro numérique, des sujets certes techniques, mais qui touchent de près aux réalités contemporaines de l’économie.

Les lauréats 2024

Catégorie Trésorerie et Financements

1er prix Julie Voisin, Université Paris Panthéon Sorbonne Conséquences de l’introduction de l’euro numérique

2ème prix Paul Lemarchand, Audencia Eclatement de la bulle : analyser la contraction du marché immobilier chinois

3ème prix Ouamaima Ouaros, Audencia Dans quelle mesure les scores ESG reflètent-ils les pratiques réelles des banques ?

Catégorie Finance

1er prix Alicia Lim, Chau Anh Nguyen et Dana Sadi, Grenoble Ecole de Management L’intégration du risque climat dans l’évaluation financière : enjeux méthodes et applications

2ème prix Lola Yans, Paris Dauphine Impact des fonds de pension sur l’environnement économique et financier

3ème prix Céline Mongkhoy, Toulouse Business School Quels types de fonds d’investissement favorisent la création d’emploi à long terme ?

Redbridge Debt & Treasury Advisory est le partenaire du prix du meilleur mémoire de finance de l’ AFTE – The French Association Of Corporate Treasurers depuis sa création. Ce sponsoring témoigne de notre engagement envers la formation et l’excellence académique des étudiants et des jeunes diplômés. En mettant en lumière la finance d’entreprise, ce prix d’excellence décerné par l’AFTE contribue à attirer de nouveaux talents dans la carrière. Il valorise également les travaux de recherche innovants, qui permettent à la communauté d’être constamment à l’avant-garde.

Nous renouvelons nos félicitations aux lauréats de ce prix 2024 et donnons rendez-vous à tous les étudiants de finance qui souhaitent se distinguer pour l’édition 2025.

 

Lors des Journées de l’AFTE, lundi 26 novembre, un atelier captivant a rassemblé un large public dans l’amphithéâtre du CNIT autour de la place de l’intelligence artificielle (IA) dans la trésorerie d’entreprise. Le sujet, à la croisée des questions d’innovation et de résilience, a mis en lumière une certitude partagée par les intervenants : tout comme pour la digitalisation, la question n’est plus de savoir s’il faut adopter l’IA, mais bien de déterminer comment, sur quels processus et pour quels résultats ?

Lors des Journées de l’AFTE, lundi 26 novembre, un atelier captivant a rassemblé un large public dans l’amphithéâtre du CNIT autour de la place de l’intelligence artificielle (IA) dans la trésorerie d’entreprise. Le sujet, à la croisée des questions d’innovation et de résilience, a mis en lumière une certitude partagée par les intervenants : tout comme pour la digitalisation, la question n’est plus de savoir s’il faut adopter l’IA, mais bien de déterminer comment, sur quels processus et pour quels résultats ?

En échanges liminaires, Manuel Costescu, co-responsable du corporate banking global chez JP Morgan, a souligné la puissance transformante de l’IA, permettant à chacun d’endosser le rôle d’un acteur technologique à part entière. Antoine Fulpin, ex-directeur des financements et de la trésorerie de grands groupes comme Total et Carrefour, a présenté l’IA comme une avancée technologique majeure. Pour Laurent Inard, associé chez Forvis Mazars, les capacités fondamentales de l’IA – détecter, prédire, recommander et imiter – en font à la fois un outil d’une utilité indéniable et un potentiel facteur de risque. Alexandar Lazarevic, directeur digital T&F chez L’Oréal, a pour sa part souligné que l’IA, à travers sa capacité à formuler des recommandations concrètes, permet de transformer les processus opérationnels des trésoriers.

La première étape dans l’intégration de l’IA réside dans la fiabilisation des données. Les experts ont unanimement souligné l’importance d’une donnée de qualité pour maximiser l’impact des algorithmes. Selon Manuel Costescu, l’effort initial de structuration des données est essentiel, car il garantit leur exploitabilité par les systèmes d’IA. Laurent Inard a précisé que différentes approches algorithmiques – supervisées, non supervisées ou pré-entraînées – permettent d’exploiter des volumes de données colossaux. Cependant, le choix des données utilisées est tout aussi crucial que leur structuration, comme l’a rappelé Alexandar Lazarevic. L’utilisation de jeux de données propres et spécifiques est indispensable pour éviter des biais ou des approximations, qui pourraient nuire à la précision des analyses.

Les cas d’usage de l’IA en trésorerie sont stratégiques, même si la table-ronde n’a malheureusement pas présenté des exemples concrets et réels. Antoine Fulpin a illustré comment l’IA révolutionne les prévisions de free cash flow. L’IA permet désormais une approche en temps réel, renforçant ainsi la précision des projections et leur conformité avec les attentes. De son coté, Alexandar Lazarevic a mis en avant l’utilité de l’IA dans la lutte contre la fraude. En analysant de vastes ensembles de données, l’IA identifie des schémas frauduleux, souvent orchestrés par d’autres intelligences artificielles, et alerte sur des menaces potentielles.

Au-delà des prévisions, Laurent Inard a détaillé les bénéfices de l’IA dans le nettoyage des données. En éliminant les doublons dans les référentiels clients et fournisseurs ou en identifiant des paiements en double, l’IA joue un rôle clé dans l’optimisation des processus. Elle peut également détecter des inefficacités organisationnelles, par exemple en repérant des volumes d’ordres anormaux, révélateurs de dysfonctionnements internes. Enfin, Manuel Costescu a évoqué l’impact du développement récent des IA génératives, capables d’extraire et d’analyser des données issues de multiples rapports financiers pour fournir des comparaisons sectorielles précises.

Cependant, intégrer l’IA dans la trésorerie ne va pas sans défis. Alexandar Lazarevic a insisté sur l’importance d’une gouvernance bien pensée, soutenue par une vision à long terme. Le choix de partenaires technologiques adaptés, qu’ils soient externes ou internes, dépend des objectifs spécifiques de chaque organisation. Laurent Inard a rappelé que, malgré les capacités croissantes des machines, le contrôle humain demeure indispensable. La différenciation entre corrélation et causalité, par exemple, nécessite encore l’expertise et le bon sens des trésoriers.

Un autre enjeu majeur est celui de l’impact environnemental. Alors que l’IA consomme d’importantes quantités d’énergie, les trésoriers doivent évaluer non seulement son retour sur investissement financier, mais également son retour sur investissement énergétique. Cette réflexion est essentielle pour concilier performance économique et durabilité environnementale.

En conclusion, si l’IA ne remplacera pas les trésoriers, elle redéfinit leur rôle en leur permettant de se concentrer sur des tâches à plus forte valeur ajoutée. L’avenir de la trésorerie repose sur une intégration réussie de ces technologies, combinant innovation, rigueur et éthique.

Nous invitons nos lecteurs à rester attentifs : dans un prochain article, nous explorerons comment les éditeurs de logiciels et les entreprises adoptent l’IA pour fiabiliser leurs processus. Le témoignage du groupement Les Mousquetaires, pionnier dans l’utilisation de l’IA pour optimiser ses prévisions de trésorerie, y sera mis à l’honneur. Une démonstration supplémentaire de l’impact transformateur de l’intelligence artificielle dans le domaine financier.

 

Avec son Pacte vert lancé en 2019, la Commission européenne a fait de la lutte contre le changement climatique un objectif prioritaire. Mais cette ambition a un prix. Les besoins de financements, notamment en titrisation transition énergétique, sont estimés à 1.000 milliards d’euros sur 10 ans et devront en partie être pourvus par le secteur privé. Dans son rapport pour réformer et relancer la croissance durable en Europe, Mario Draghi a désigné la titrisation parmi les instruments à relancer pour relever les ambitieux défis de transition énergétique des 27. Il est vrai qu’en matière de titrisation verte, l’Europe a pris un sérieux retard sur les États-Unis, et même sur la Chine.

Le retard de l’Europe

Outre-Atlantique, l’agence Fannie Mae est le plus gros émetteur mondial de Mortgage Backed Securities verts. La titrisation transition énergétique est également très largement utilisée par les installateurs de panneaux photovoltaïques, qui mobilisent ainsi leurs contrats de leasing opérationnel ou les cash flows futurs de Power Purchase Agreements. Plus récemment, elle s’est élargie aux prêts consentis aux particuliers pour financer leurs installations. Dans son ensemble, la titrisation verte représente 32 % des émissions vertes aux États-Unis en 2022.

En Chine, ce pourcentage atteint 8 %. Les premiers ABS verts ont été émis dès 2016, et depuis lors, des classes d’actifs très diverses ont été exploitées : revenus d’éoliennes, leasing d’équipement énergétique, créances clients « vertes », etc.

En Europe, la titrisation, y compris pour la transition énergétique, ne représente que 2 % des émissions vertes. Le volume titrisé augmente, certes. Il a doublé en 2023 par rapport à 2022, pour atteindre 2,4 milliards d’euros, mais reste très en deçà des besoins, estimés par l’AFME à près de 300 milliards d’euros par an pour le financement de la construction verte, de la rénovation énergétique des logements et du passage à la voiture électrique.

Un marché en croissance

Parmi les opérations de titrisation vertes en Europe figurent une majorité d’émetteurs bancaires, qui utilisent cette technique pour soutenir des projets de transition énergétique. Ainsi, la Landesbank Baden-Württemberg a-t-elle pu dernièrement obtenir 350 millions d’euros pour financer des centrales solaires et des parcs éoliens, avec le support de l’European Investment Bank (EIB).

Les émetteurs non bancaires sont plus rares, mais les transactions se multiplient :

  • En 2022, Perfecta Energia (un installateur espagnol de panneaux solaires) a lancé un fond de titrisation de 133 millions d’euros, qui facilitera le développement de l’énergie solaire résidentielle.
  • En 2023, Enpal GmbH (un installateur allemand) a monté un programme de warehousing de 365 millions d’euros, permettant de financer 12.500 installations.
  • En janvier 2024, Powen Group a titrisé un portefeuille diversifié d’actifs solaires espagnols (prêts, leases, PPAs, à la fois résidentiels et industriels), pour 120 millions d’euros.
  • En novembre 2024, Enpal a lancé la toute première titrisation publique d’actifs solaires pour 240 millions d’euros. La marge est de 40 points sur l’Euribor 1 mois sur la part « AAA », et 85 points sur la part « AA -»  .

De nombreuses entreprises énergétiques se financent projet par projet dans des sociétés ad hoc en injectant dans chacune du capital et ont des difficultés à se trouver des fonds au niveau de la holding : une titrisation pourrait (re)financer certains projets en les mutualisant – a minima pour les actifs au stade de production.

Le marché de la titrisation verte peut et doit prospérer. La Commission européenne travaille à un assouplissement de la règlementation, qui devrait faciliter les transactions (pour en savoir plus, lire notre article Titrisation : une reprise nécessaire du marché européen paru précédemment).

Il faut souligner que la titrisation d’actifs liés à la production énergétique soulève des questions spécifiques par rapport aux autres formes de titrisation, notamment :

  • La mesure du risque de défaut et de remboursement anticipé par les consommateurs est rendue difficile par l’absence de données historiques, et parfois, la taille réduite des portefeuilles d’actifs ;
  • Certains risques non financiers doivent être étudiés, tels le risque de renégociation des contrats, le risque de performance technologique, de maintenance insuffisante des installations, ou encore le risque climatique.

Redbridge et son partenaire Accola disposent d’une solide expérience du conseil en titrisation, incluant plusieurs transactions de leasing opérationnel. Nous sommes convaincus que la titrisation a un rôle clé à jouer dans la réalisation des objectifs ambitieux du Pacte vert, que le collateral soit constitué de prêts, de flux de leasing ou de contrats d’offtake.

Schéma de titrisation de contrats de leasing d’énergie solaire

titrisation transition energetique

a Pour prendre un exemple concret, la société Sunrun a installé pour 5 gigawatts de panneaux solaires depuis sa création en 2007 ; 41% de ces installations ont été financées par la titrisation.
b Power Purchase Agreement: contrat d’offtake passé entre le producteur d’électricité et le consommateur
c Programme PACE (Property Assessed Clean Energy)
d Dec 2022, AFME, European Green Securitisation Regulatory State of Play

 

 

 

Gabriel Lucas, directeur chez Redbridge Debt and Treasury Advisory, aborde le sujet de l’augmentation de la fraude amicale et des rétrofacturations (les chargebacks frauduleux), en dévoilant quelques stratégies pour y remédier.

Cet article a été initialement publié dans le magazine The Paypers. 

Introduction aux chiffres des rétrocessions et chargebacks frauduleux

Dans le paysage en constante évolution du commerce numérique, les rétrocessions et chargebacks frauduleux  (également connue sous le nom de fraude de première partie, car ce comportement frauduleux est tout sauf amical) sont devenues l’une des principales préoccupations des commerçants, car elles représentent un sujet opaque qui engendre des pertes considérables.

En 2023, les rétrocessions devaient représenter environ 120 milliards de dollars (selon une projection réalisée par Chargebacks911 sur la base des données de Mastercard) de pertes globales pour les commerçants. La fraude de première partie, qui représente 75 % de ces rétrocessions (selon Visa), coûterait donc aux commerçants environ 90 milliards de dollars par an. L’essor du commerce électronique a exacerbé ce problème, la fraude de première partie augmentant de 20 % chaque année (selon Adyen). Pour y remédier, il faut améliorer les méthodes de vérification et les systèmes de gestion des litiges afin de limiter les pertes et de se prémunir contre les contestations frauduleuses.

Rétrofacturation (chargebacks frauduleux), fraude de première partie et détournement de politique commerciale, quelles différences ?

La rétrofacturation est l’annulation d’une transaction initiée par la banque d’un titulaire de carte pour contester des frais non autorisés ou erronés, afin de protéger le consommateur d’une fraude et d’une erreur du commerçant. La fraude de première partie ou les chargebacks frauduleux survient lorsque le titulaire d’une carte conteste un débit légitime pour obtenir un remboursement, tout en conservant les biens ou les services, très souvent en exploitant intentionnellement le système. La différence essentielle entre rétrofacturation et fraude amicale réside dans l’intention : les rétrofacturations concernent des problèmes réels, tandis que la fraude amicale implique des réclamations trompeuses. Les deux peuvent être coûteux pour les commerçants, mais la fraude amicale est plus difficile à combattre car elle regroupe des litiges sur des transactions initialement autorisées par le titulaire de la carte.

Très proche de la fraude de première partie, puisqu’elle est la plupart du temps le fait de véritables clients, l’abus ou le détournement de politique commerciale est de plus en plus fréquemment observé désormais. Il englobe des situations où les consommateurs exploitent ou manipulent les conditions générales fixées par les commerçants ou les prestataires de services. Il peut s’agir d’exploiter les politiques de retour, d’abuser des programmes de fidélisation, d’utiliser les failles des offres de réduction ou de faire de fausses demandes de remboursement ou de compensation.

Comment les commerçants peuvent-ils relever ces enjeux ?

Pour lutter efficacement contre les rétrofacturations, la fraude de première partie et les abus de politique commerciale, les entreprises peuvent mettre en œuvre une approche à plusieurs dimensions en s’appuyant sur les idées et les stratégies d’experts du secteur :

  1. Règles et communication claires – suivre les procédures établies par les sources les plus fiables, comme les réseaux de cartes, et veiller à ce que des règles transparentes concernant les paiements, les retours et la résolution des litiges soient clairement communiquées aux clients afin de limiter les abus de politique commerciale.
  2. Stratégie avancée de prévention de la fraude – Pensez à utiliser des outils spécialisés qui emploient l’apprentissage automatique (ML) et l’intelligence artificielle (IA) pour détecter les schémas suspects et prévenir les transactions frauduleuses de manière proactive. Leur principal atout par rapport aux outils traditionnels basés sur des règles est qu’ils collectent un nombre extrêmement élevé de points de données afin de pouvoir déterminer individuellement le profil du client et donc de prendre de meilleures décisions – par conséquent, cela vaut pour les rétrofacturations mais aussi pour les abus de politique comme le « wardrobing » (c’est-à-dire les clients qui renvoient un produit après l’avoir utilisé pour une occasion spécifique) ou la fraude au remboursement (c’est-à-dire le retour d’un produit différent de celui qui a été acheté à l’origine). En outre, certaines de ces solutions peuvent également proposer une garantie de rétrofacturation, ce qui peut s’avérer utile dans certains cas.
  1. Contrôle et réponse en temps réel aux demandes de remboursement – utiliser des systèmes de contrôle des chargebacks en temps réel, soit internes, soit provenant de fournisseurs spécialisés, pour identifier et répondre rapidement aux situations, prévenir certaines d’entre elles avant même qu’elles ne se formalisent et résoudre les litiges avant qu’ils ne s’aggravent.

En intégrant ces stratégies, les commerçants peuvent atténuer efficacement les risques associés aux rétrofacturations, à la fraude de première partie et à l’abus de politique commerciale. Cette approche proactive permet non seulement de protéger les intérêts financiers, mais aussi d’améliorer la satisfaction des clients et de renforcer la sécurité globale de l’entreprise.

Conclusions

Les rétrocessions et la fraude amicale représentent des défis importants dans le paysage du commerce numérique. Ainsi, la mise en œuvre d’une stratégie de rétrofacturation efficace présente plusieurs avantages clés pour les entreprises :

  1. Réduction des pertes financières – en déployant des technologies avancées de détection des fraudes et des systèmes de contrôle proactifs, les entreprises peuvent identifier et prévenir les transactions frauduleuses à un stade précoce. Cela permet de minimiser l’impact financier des rétrocessions et de préserver les recettes.
  2. Renforcement de la confiance des clients – la communication transparente des politiques et la gestion proactive des litiges contribuent à une expérience positive pour les clients. La résolution rapide et équitable des rétrocessions peut renforcer la confiance et la loyauté des clients, ainsi que leur confiance dans l’entreprise.
  3. Respect des normes du secteur – le respect des meilleures pratiques et des lignes directrices d’organisations telles que Visa garantit la conformité avec les réglementations et les normes du secteur. Cela protège l’entreprise contre les pénalités et préserve sa réputation sur le marché.
  4. Amélioration de l’efficacité opérationnelle – des politiques claires et des processus de résolution des litiges rationalisés permettent aux entreprises de traiter les rétrocessions de manière plus efficace. Cela réduit les charges administratives et permet au personnel de se concentrer sur les activités principales plutôt que de gérer les litiges de manière réactive.
  5. Des relations renforcées avec les prestataires de paiement – une gestion efficace des rétrocessions favorise des relations positives avec les prestataires de paiement et les réseaux de cartes. Cela peut conduire à une réduction des frais de traitement, à de meilleures conditions et à une résolution plus rapide des problèmes de paiement.

 

En conclusion, une stratégie de rétrofacturation bien exécutée protège non seulement la santé financière de l’entreprise, mais améliore également la satisfaction des clients, renforce l’efficacité opérationnelle et favorise les relations positives au sein de l’écosystème de paiement. En investissant dans des technologies, des politiques et des formations qui soutiennent une gestion efficace de la rétrofacturation, les entreprises peuvent atténuer les risques et se positionner pour un succès à long terme sur un marché de plus en plus concurrentiel et digitalisé. Veuillez-vous référer à nos articles pour d’autres stratégies d’atténuation des rétrofacturations tout en garantissant des taux d’acceptation maximaux.

Besoin d'échanger sur votre problématique ?

Le rapport Draghi sur la compétitivité européenne* est sans équivoque : « Pour augmenter la capacité de financement du secteur bancaire, l’UE doit relancer la titrisation ». La Commission Européenne vient, en réponse, de lancer une consultation** ciblée sur le fonctionnement du marché de la titrisation.

La titrisation a particulièrement souffert en Europe des conséquences de la crise financière de 2008. Avant la crise, le marché européen (incl. le Royaume Uni) représentait 75% de celui des Etats Unis. En 2020, il s’établissait à seulement 6%. A l’origine de cet écart on trouve, notamment, des règlementations plus sévères dans l’Union Européenne.

La règlementation post crise

Le législateur européen a réagi à la crise en renforçant en 2017 le cadre de la titrisation (Règlementation EU 2017/2402 et 2017/2401) :

  • Pour lutter contre l’aléa moral (le fait que les banques originatrices d’opérations de titrisation n’analysent pas suffisamment le risque de crédit de leurs emprunteurs puisque, ce risque étant cédé à des investisseurs tiers, elles ne sont elles-mêmes que faiblement exposées aux pertes), le législateur a imposé aux originateurs de conserver au moins 5% du risque titrisé. Il a aussi contraint les banques à appliquer des mesures de « due diligence » strictes concernant les prêts titrisés.
  • Le cout en capital des Asset Backed Securities (ABS) a été revu à la hausse et la dépendance vis-à-vis des agences de notation a été réduite. En effet, avant la crise, le traitement prudentiel de la titrisation reflétait souvent la note attribuée par les agences de rating aux tranches d’ABS émises. Or, il s’est avéré que les agences avaient mal modélisé le risque inhérent à certaines de ces tranches, donnant à tort aux investisseurs l’impression qu’elles étaient presque sans risque.
  • Des règles précises définissent désormais les actifs éligibles à la titrisation ainsi que les obligations applicables au cédant en matière de sélection des actifs à titriser.
  • L’obligation d’information des investisseurs a été renforcée.

La Commission Européenne a par ailleurs encouragé la mise en place d’opérations « Simples, Transparentes et Standardisées (STS )» par l’application d’un traitement en capital plus favorable. Ces opérations ne peuvent porter que sur certains types d’actifs, respectant des règles de qualité et de diversification. Cependant, l’obtention du label STS se fait aujourd’hui sur la base d’une documentation relativement complexe à fournir à l’Autorité Européenne des Marchés Financiers.

La reprise se fait attendre

Les nouvelles règles sont entrées en vigueur au 1er janvier 2019 et, plus de cinq ans après, force est de constater que l’activité n’a pas vraiment repris. Dans un rapport daté d’octobre 2022***, la Commission rapporte que les intervenants de marché ne pensent pas que la règlementation ait permis de relancer la titrisation. La base d’investisseurs est par ailleurs demeurée étroite.

Or, la titrisation est une technique très attrayante pour les entreprises et ce d’autant plus que le contexte économique pèse sur les besoins en fonds de roulement (BFR). En effet, par le jeu du tranching du risque, il leur est possible de se financer à des spreads très inférieurs à ceux qui auraient été obtenus par recours direct au crédit bancaire. Par exemple, une entreprise de qualité de rating  « BB », dont le spread « senior unsecured » serait de 150 bps, se financera par titrisation à un niveau « AA », permettant de réduire le spread de 50 bps.

Vers une réforme d’envergure

De nombreux groupements d’intérêt (notamment l’Association for Financial Markets in Europe – AFME, la Fédération bancaire européenne, Paris Europlace) ont formulé des propositions concrètes pour améliorer l’attractivité de la titrisation.

Dans sa consultation ciblée en cours, la Commission Européenne reprend certaines des critiques formulées par ces acteurs de marché, dans le but d’évaluer le bien-fondé des mesures suivantes :

  • Une clarification de la définition de ce que constitue une titrisation
  • Un allégement des exigences de due diligence et de transparence
  • Une réduction du cout en capital des opérations de titrisation pour les institutions financières
  • Une amélioration du traitement prudentiel des investisseurs compagnies d’assurance et fonds de pension

La Commission ne limite pas son approche à la seule titrisation bancaire, mais s’inquiète également de la titrisation directe de créances clients ou contrats de leasing par les entreprises.

Il est maintenant très probable que le statut du produit titrisation s’améliore à court terme, avec à la clé des économies pour les émetteurs. Accola et Redbridge disposent d’une expertise unique dans ce domaine. Nous venons en 2024 de clôturer trois transactions pour un volume cumulé de EUR1.7mds. Pour en savoir plus sur ces opérations :

Mission – NGE – Titrisation

Mission – Saint Gobain – Titrisation

 

* Sept 24, The future of European competitiveness – A competitiveness strategy for Europe

** Oct 24, Targeted consultation on the functioning of the EU securitisation framework

*** Oct 22, Report of the Commission to the European Parlement on the functioning of the securitization regulation.

 

A l’attention des responsables financiers d’entreprises, voici un peu de matière sur une réalité contemporaine du cash management aux Etats-Unis.

Que penseriez-vous si votre banque, après une hausse des taux directeurs, ne relevait pas dans les mêmes proportions le taux qui rémunère vos dépôts sous la forme d’un bon de réduction pour votre facture de cash management ?

J’imagine qu’après vous y être pris à deux fois pour lire « un bon de réduction pour votre facture de cash management », la tentation est forte de répondre que les trésoriers américains sont bien chanceux de bénéficier d’un pareil mécanisme, dénommé ECR ou Earning Credit Rate.

Mais notre propos concerne la relation bancaire. Et où qu’elle se situe, cette relation doit reposer sur des bases transparentes et équilibrées.

Or, les banques américaines n’ont répercuté que très partiellement les hausses de taux d’intérêts sur l’ECR durant la phase de resserrement monétaire de 2022-2023. Elles ont aussi un peu trainé les pieds et été plutôt lentes à agir après chaque décision de la Fed. C’est ce que montre le graphique ci-dessous, qui présente l’évolution des taux d’ECR d’une série d’entreprises américaines ayant partagé leurs données avec Redbridge, en préalable à une renégociation de leurs conditions de cash management.

Aujourd’hui, le vent tourne. La Fed a procédé fin septembre à une première baisse de taux et nos premiers retours montrent que les banques américaines n’attendent pas cette fois-ci pour minorer l’ECR à pleine proportion. Alors évidemment, le trésorier français, qui s’est battu vainement contre l’instauration du floor de l’Euribor dans les contrats de prêt, se dira que c’est un peu la même histoire qui se joue ici. Que les banques gagnent toujours à la fin. Mais il n’y a pas de fatalité.

A tous les groupes ayant des opérations aux Etats-Unis, Redbridge envoie un message simple : l’ECR négocié avec sa banque américaine peut, et doit, reposer sur un mécanisme transparent et automatique. Il est possible de fixer un spread par rapport au Fed Fund Rate apportant une rémunération largement supérieure à votre ECR actuel qui, comme nous le voyons trop souvent, est généralement laissé de côté dans les négociations. Les taux américains vont continuer de baisser, mais il reste possible d’agir pour payer son cash management outre-Atlantique moins cher.

 

Depuis le 1er octobre, Wero change la donne des paiements en Europe et nous avons le plaisir de proposer en replay notre webinaire consacré au lancement de cette nouvelle solution de paiement de particulier-à particulier : « Comment changer la manière dont l’Europe paie ? »

EPI Company a officiellement lancé ce 1er octobre la solution de paiement Wero. Pour connaître le fonctionnement et les ambitions à moyen terme dans la sphère du commerce de cette nouvelle solution de paiement paneuropéenne, écoutez le replay de notre émission en compagnie de Ludovic Francesconi (EPI), Pierre-Antoine Vacheron (Groupe BPCE) et Alain Lacour (Lyra Network). 

 

Replay - Webinaire - WERO change la donne des paiements en Europe

Venez écouter notre discussion enrichissante en compagnie de trois responsables qui œuvrent au quotidien à transformer notre écosystème des paiements.

• Ludovic Francesconi, responsable de la stratégie chez EPI / Wero

• Pierre-Antoine Vacheron, directeur général Paiements du Groupe BPCE

• Alain Lacour, président de Lyra Network

 

L’événement était animé par Emmanuel Léchère, responsable des études et publications et Gabriel Lucas, director – conseil en monétique chez Redbridge.

A propos de Wero
Wero est une plateforme innovante qui révolutionne la gestion des paiements en Europe. Grâce à des solutions technologiques avancées, Wero simplifie et sécurise les transactions financières, offrant ainsi une expérience utilisateur fluide et efficace.

A propos de Redbridge
Redbridge fournit aux entreprises des solutions modernes pour les paiements. En offrant des services personnalisés et une assistance continue, Redbridge permet à ses clients de se concentrer sur leur cœur de métier tout en bénéficiant d’une gestion des paiements efficace et fiable.

La nouvelle étude annuelle de Redbridge sur la stratégie de financement des principaux groupes cotés français révèle des signaux menaçants pour les profils de crédits : tensions sur les besoins en fonds de roulement et impact fort de la hausse des taux sur les charges financières.

Dans un environnement où les banques deviennent frileuses, le spécialiste du conseil en financement-trésorerie suggère aux directions financières de parer au risque d’un cycle de baisse des taux de courte durée, en anticipant sur leurs refinancements et en examinant le recours à des poches de liquidité alternatives cohérentes avec leurs profils de risque et leurs critères de décision.

 

Paris, le 23 septembre 2024 – Les principales conclusions de la quatorzième enquête de Redbridge sur la stratégie de financement des 100 corporates du SBF 120 (comptes 2023 et 1er semestre 2024) sont les suivantes :

En 2023, les entreprises du SBF 120 (hors valeurs financières et foncières) ont connu une dégradation notable de leurs agrégats financiers, qui s’est amplifiée au premier semestre 2024 pour désormais intégrer « à plein » les effets de l’inflation et de la hausse des taux.

  • Sur les 18 derniers mois, le recul de la profitabilité (EBITDA) a été accentué par une détérioration de tous les postes du BFR des entreprises.
  • L’endettement net des principales sociétés cotées françaises progresse de 120 milliards d’euros par rapport à fin 2022.
  • La situation observée en France et en Europe contraste avec celle des Etats-Unis où les entreprises se montrent plus résilientes dans un contexte d’inflation et de hausse des taux.

Les conséquences des hausses de taux initiées en 2022 se sont amplifiées pour les prêteurs bancaires, les investisseurs et les corporates.

  • Côté prêteurs bancaires, la liquidité bancaire est moins importante mais le repricing des marges qui avait marqué la moitié de l’année 2022 et l’année 2023, s’est stabilisé depuis cet été.
  • Les investisseurs (prêteurs obligataires) ont confirmé leur repositionnement, pour la partie placements privés, sur des signatures de crédit « non investment grade », à des niveaux de marges (spreads) beaucoup plus élevés qu’avant la hausse des taux.
  • Côté corporates, la hausse des frais financiers s’étant amplifiée en 2023 et au premier semestre 2024, certaines entreprises ont repoussé des opérations de financement dans l’attente de la baisse des taux et favorisé des solutions plus flexibles comme l’affacturage et le « leasing ».

 

 

Pour Muriel Nahmias, Managing Director, conseil en financement de Redbridge : « La fin de l’abondance sur les marchés de dette bancaire et les incertitudes sur l’ampleur de la baisse des taux en Europe impliquent de préférer un refinancement anticipé de ses lignes bancaires, jusqu’à deux ans voire trois ans avant l’échéance. Lorsque possible, le recours à l’affacturage doit être poursuivi, à condition d’être mené sur des conditions de prix optimisées. Enfin, la question d’une notation externe, privée ou publique, doit être rouverte afin de pouvoir bénéficier de toutes les opportunités de diversification offertes par les marchés de dette désintermédiée. »

Pour Matthieu Guillot, Managing Director, conseil en financement de Redbridge : « Les perspectives de baisses des taux ne doivent pas faire oublier les bons réflexes pour sa stratégie de dette : quelle est la juste note que mes banques doivent m’attribuer ? Dois-je considérer me faire noter par une agence externe pour un rating privé ou public ? Quelle est la bonne structure de mon pool bancaire compte tenu de mon courant d’affaires et de mon profil de crédit ? Enfin, même en l’absence de mur de liquidité approchant, ni de besoins immédiats, il est conseillé de réfléchir à un refinancement anticipé tant que les voyants de l’entreprise sont au vert ».

Pour Didier Philouze, Managing Director, responsable du pôle conseil en financement de Redbridge : « Si l’augmentation significative du BFR affecte les niveaux de dette nette des entreprises, le recours pragmatique à l’affacturage (avec ou sans recours) et à la titrisation ont permis de piloter le levier et continueront de représenter des sources de liquidité opportunistes et attractives ».

L’étude complète est disponible sur demande.

Fondé en 1999, Redbridge Debt & Treasury Advisory est le partenaire international de référence des directions financières. Ses équipes, situées à Paris, Genève, Londres, New York, Chicago et Houston, ont mené plus de 750 missions sur les dix dernières années pour aider les entreprises à optimiser leurs financements et leur trésorerie, de la conception stratégique des solutions à leur mise en œuvre opérationnelle.

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Contact :
Laetitia Hottinguer
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Emmanuel Léchère
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Redbridge ouvre un nouveau bureau à Chicago

Redbridge ouvre un nouveau bureau à Chicago

Chicago, le 2 septembre 2024 – Redbridge Debt & Treasury Advisory, le conseil des directions financières, est heureux d’annoncer l’ouverture d’un bureau à Chicago, dans la Willis Tower. Cette nouvelle implantation marque le 25ème anniversaire de la société et souligne son engagement auprès du marché américain.

« Alors que Redbridge célèbre vingt-cinq années d’excellence et d’innovation dans les services de conseil en financement-trésorerie, l’ouverture du bureau de Chicago s’est révélée comme une évidence », a déclaré Patrick Mina, Chief Executive Officer de Redbridge. « Notre équipe était déjà particulièrement active dans le Midwest américain, et avoir une présence physique améliorera notre capacité à servir les grandes entreprises de la région et au-delà. »

Le nouveau bureau de Chicago complète le maillage territorial de Redbridge, qui disposait aux Etats-Unis d’implantations à New York et Houston. Cette nouvelle ouverture témoigne de la croissance du groupe et de son engagement à fournir à ses clients les meilleurs services de conseil en matière de financements, de trésorerie et de paiements.

À propos de Redbridge Debt & Treasury Advisory

Fondé en 1999, Redbridge Debt & Treasury Advisory est le partenaire international de référence des directions financières. Ses équipes, situées à Paris, Genève, Londres, New York, Houston et Chicago, aident les entreprises à optimiser leurs financements et leur trésorerie, de la conception stratégique des solutions à leur mise en œuvre opérationnelle.

Pour plus d’informations sur Redbridge et ses services, veuillez consulter le site www.redbridgedta.com/fr

Contacts :

Europe

Emmanuel Léchère
Redbridge Debt & Treasury Advisory
elechere@redbridgedta.com

 

Etats-Unis

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Redbridge Debt & Treasury Advisory
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